4e de couverture : voilà la vie conjugale, une association de tueurs qui s'en prennent aux autres avant de s'en prendre à eux, un long chemin vers la mort qui laisse des cadavres sur la route. Lorsque vous voyez un homme et une femme devant le maire, demandez-vous lequel des deux sera l'assassin.
Mon avis : Petits crimes conjugaux est la mise à nu des soucis conjugaux de Lisa et Gilles. Le début de la pièce s'ouvre sur le retour chez lui de Gilles qui, amnésique suite à une chute, ne se souvient plus de rien. Lisa, raconte à son mari l'homme qu'il est, le couple qu'ils forment. Rapidement pourtant, certaines failles apparaissent et l'on sent que le couple ne va pas aussi bien que Lisa le dit....
Encore une fois, je suis frappée par la justesse de la vision de cet auteur. Cet aspect m'avait déjà marqué dans Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran mais ici, je dois dire que sa délicatesse ressort encore plus dans cette pièce. Je suis étonnée de cette aptitude à se mettre à la place de ces personnages et en particulier quand Lisa parle. Si je n'avais su qui était l'auteur, j'aurai parié pour une femme.
Mêlant finesse d'analyse, lucidité caustique mais aussi sensibilité, Eric-Emmanuel Schmitt sait mettre en exergue les failles de ce couple : la confiance qui s'est effritée, la fidélité remise en cause, l'usure de la vie commune... Il analyse à quel point des pulsions de haine peuvent cohabiter avec l'amour inconditionnel de l'autre. En filigrane reste la question essentielle : l'amour surmonte-t-il tous les obstacles ? Pour y répondre rien ne vaut la lecture de ces 120 pages !
En résumé : un coup de coeur pour cette pièce qui m'a beaucoup touchée ! 17/20.
Merci qui ? Merci à celui qui m'a prêté cette pièce et qui se reconnaîtra : que tes projets concernant cette pièce aboutissent.... Un petit clin d'oeil pour toi avec les extraits choisis.
Extraits choisis...
Gilles : Lisa, le couple est une maison dont les habitants possèdent la clé. Si on les enferme de l'extérieur, elle devient une prison et eux des
prisonniers.
Lisa : Connais-tu des gens qui vont quelque part pour s'en évader ? Tu es comme ça.
Gilles : Non.
Lisa : Tu vois des femmes, tu as des rendez-vous, tu grouilles de désirs.
Gilles : Tu es ma santé. Mes rencontres sont ma fièvre.
Lisa : Tu t'enrhumes beaucoup.
Gilles : C'est ce que tu crois. Tu n'en sais rien.
Lisa : Non. Mais j'imagine...
Gilles : Tu sais ou tu imagines ?
Lisa (hurlant). J'imagine ! Mais c'est pareil. Ca fait aussi mal !
Gilles : Peut-être plus.
p. 102 et 103.
Gilles : Je t'adorais et j'oubliais de te le dire. Je ne suis qu'un homme Lisa et la caractéristique des hommes, c'est qu'ils refusent leur destin. Ils
préfèrent leur liberté. Mais qu'est-ce que c'est, une liberté qui ne s'engage pas ? Une liberté creuse, vide, inconsistante, une liberté qui ne choisit rien, une liberté velléitaire, une liberté
préventive. Les hommes fantasment la liberté plus qu'ils ne l'utilisent, ils la gardent précieusement sur une étagère au lieu de l'employer. Là, elle sèche, se racornit et meurt bien avant eux.
Car la liberté n'existe que si l'on s'en sert. Les hommes sont silencieusement romanesques : ils vivent quelque chose et se racontent autre chose. Ils doublent leur vie d'une autre vie, secrète,
désirée, imaginée, dont ils sont les poètes muets.
p.114
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